Innovation et résilience chez Précis Mécanic

Après un incendie majeur, la PME iséroise a su rebondir grâce à une collaboration étroite avec Jongen Uni-Mill. En intégrant des fraises à plaquettes grande avance, innovantes par rapport aux outils traditionnels, elle a optimisé sa production tout en renforçant son partenariat, notamment pour l’usinage de l’inox.
C’est en 1966 que l’entreprise Précis Mécanic a vu le jour, située entre le massif de la Chartreuse et la chaîne de Belledonne. Le grand-père maternel des actuels dirigeants, Joseph Marotta, s’était associé avec Alain Bruschet, Victor Di Nola et Louis Pagano pour créer leur entreprise de mécanique à Grenoble, dans les anciens locaux de la chocolaterie Cemoi. Sur des machines-outils conventionnelles, ils produisent des pièces pour le géant grenoblois du matériel électrique Merlin Gerin.
Avec l’essor du marché électrique, Claude et Michèle Nicolas, la seconde génération, reprennent la société en 1995. Ils s’appuient sur la qualité, en obtenant la certification ISO 9001. L’entreprise se développe avec un chiffre d’affaires multiplié par six et s’installe à Sassenage, près de la capitale des Alpes, en 1996, avec une croissance qui l’accompagnera jusqu’aux années 2000. « Le marché de l’énergie s’est essoufflé, beaucoup de pièces sont parties en Asie. C’est à partir de cette période-là qu’on a cherché à se diversifier sur de nouveaux marchés comme la robotique, la chimie, les vérins hydrauliques, les vannes, le poids lourd et la mécanique générale », évoque Quentin Nicolas, troisième génération à la tête de l’entreprise.
L’alarme incendie retentit
La pandémie due au Covid-19 marquera un tournant. C’est l’année de la reprise de la société par Quentin, son frère Pierre et sa sœur Stéphanie. L’urgence sanitaire levée, la croissance industrielle explose. Les machines tournent à plein régime. Puis, c’est l’accident. Un incendie éclate le 18 mai 2022, depuis un tableau électrique. L’alarme incendie retentit aux alentours de 23 heures. Heureusement, personne ne travaille à cette heure-ci, mais les machines robotisées, elles, oui.
Pas moins de 2 500 mètres carrés du bâtiment sont ravagés par les flammes. Heureusement, le site voisin, de 1 000 mètres carrés, est épargné. « On a fait comme on a pu, et on a loué un local de 700 mètres carrés, un kilomètre plus loin, afin de pouvoir stocker nos matières premières et installer un atelier de montage. Le second site a permis de poursuivre une partie de la production », se souvient Quentin Nicolas, qui se dit chanceux ne pas avoir dû arrêter l’activité.
Des réunions avec les fournisseurs… sur le parking
Certains fournisseurs se sont très vite mobilisés. Comme le distributeur de machines-outils lyonnais Degomme Boccard, auquel Quentin Nicolas tient à remercier. « Arnaud Degomme et son équipe ont décalé des réservations de machines pour nous dépanner le plus rapidement possible », raconte-t-il. Un autre partenaire n’a pas tourné les talons pendant cette période difficile : Jongen Uni-Mill. « Le lendemain matin, Julien [Bavu, le directeur technique du fabricant allemand d’outils coupants] était sur le parking, parce que le parking était devenu notre bureau. Il nous a sorti tous les outils qu’il avait dans sa voiture », se rappellent Quentin Nicolas et Laurent Simon, directeur technique de Précis Mécanic. « Avec Gregory, le chef d’atelier, je faisais les réunions sur un touret de câbles avec ma tablette sur les genoux », enchaîne Julien Bavu. Il explique comment son entreprise a répondu présent. « On leur a mis à disposition tout le matériel qui avait brûlé, et qui était, à l’époque, dans leur armoire de consignation. Quand j’ai expliqué à Claire [Chimier, responsable de la filiale en France] que l’entreprise avait brûlé, cela l’a touchée personnellement, elle avait de l’émotion et m’a dit : qu’est-ce qui va se passer pour eux ? Qu’est-ce qu’il faut faire ? On a fait le maximum sur la partie financière de manière à ne pas facturer le plus longtemps possible. » Aujourd’hui, c’est devenu un (pas si) lointain souvenir. L’entreprise a retrouvé un bâtiment tout neuf et la production est repartie de plus belle.
Se familiariser avec le fraisage grande avance
En s’éloignant du marché de l’appareillage électrique, Précis Mécanic s’était retrouvée avec de plus en plus de pièces prismatiques à usiner, et non pas sur des matières comme le cuivre et l’aluminium, mais sur de la fonte et de l’acier. La première rencontre entre l’entreprise de mécanique et le fournisseur d’outils Jongen remonte avec l’arrivée de ces nouvelles pièces. « Nous usinions des carters de pompes en fonte, explique Laurent Simon. On travaillait à l’ancienne avec des fraises HSS ravageuses, sauf que nous n’étions plus au prix du marché. C’est la raison pour laquelle nous avons consulté Jongen. » A l’époque, Guy Moralès était le directeur technique de Jongen Uni-Mill, sur la région. « Il s’est mis au pied de la machine avec nous et je me rappelle très bien, on y a passé toute la journée, jusqu’à plus de 21 heures, pour essayer les outils les plus appropriés. Mais surtout, il nous a expliqué comment bien les utiliser », raconte M. Simon, tout en précisant que le fraisage grande avance sur outils à plaquettes n’était pas leur spécialité. « Et au final, on est parvenu à nous libérer de certaines contraintes que nous nous infligions en fraisage, avec pour conséquence d’être plus productifs. »

La plaquette XC40 montée sur une fraise grande avance à six dents.
Alors que Précis Mécanic a fait le choix de se fournir en outillage auprès de distributeurs de proximité, pour le fraisage l’entreprise a changé ses habitudes. L’implication de Guy Moralès, puis de son successeur Julien Bavu, en raison de son départ à la retraite, a convaincu le mécanicien à travailler en direct. « Une vraie relation de confiance s’est installée entre nous et notre fournisseur », se félicite Laurent Simon, qui sait qu’il pourra compter sur Julien Bavu. « Dès le plan, dès le moment où nous devions faire le choix de l’outil de fraisage, nous appelions Guy, maintenant Julien, décrit M. Simon. Il venait à l’usine, nous nous mettions autour d’une table, et il regardait le plan, on lui expliquait sur quelle machine nous voulions produire la pièce, comment nous pensions la monter, etc. »
Un nouveau revêtement développé avec Précis Mécanic
La relation entre les deux entreprises s’est renforcée lorsque Julien Bavu, alors directeur technique, a commencé à piloter des essais de nouveaux outils Jongen. En apprenant cela, Laurent Simon a su que M. Bavu cherchait des ateliers pour mener ses tests. « Nous lui avons aussitôt proposé de mettre le nôtre à disposition. »
Une aventure commune
Comme Précis Mécanic travaille beaucoup l’inox, une matière sur laquelle le fabricant de fraises mène plusieurs développements, et « qu’on est naturellement attirés par le progrès technologique », glisse M. Simon, l’idée a émergé, lors d’une discussion entre les deux hommes, de faire profiter à Jongen les machines de l’atelier de Sassenage. « Puis, poursuit Laurent Simon, autant progresser ensemble : ils nous ont toujours aidés à avancer. » Julien Bavu a mené plusieurs campagnes d’essai sur de nouveaux revêtements d’outils avec son client basé en Isère. « Tous les essais réalisés ont abouti à des résultats concrets, assure M. Bavu. On a essayé une multitude de revêtements aux compositions chimiques différentes. D’ailleurs, nous venons de commercialiser un nouveau revêtement avec une granulométrie très fine, le XC40. Un revêtement qui a été testé en avant-première chez Précis Mécanic », se réjouit Julien Bavu. Et d’ajouter, des souvenirs encore plein la tête : « Il y a eu plusieurs variantes jusqu’à ce que nous trouvions celle qui serait la plus performante. Désormais, ce revêtement est référencé dans notre catalogue pour le marché mondial. »
Cette aventure commune illustre avant tout une belle histoire de confiance et de passion partagée pour la technologie, où chaque étape franchie est venue renforcer le lien entre les hommes autant que les entreprises.