Métaux critiques : une stratégie nationale pour réarmer l’industrie mécanique
Ce plan, soutenu à hauteur de 5,4 milliards d'euros, représente une source de défis, mais surtout d'opportunités pour l'ensemble de notre tissu industriel.
Pour tout acteur de l’industrie mécanique, des grands donneurs d’ordres aux sous-traitants spécialisés, la volatilité et la vulnérabilité des chaînes d’approvisionnement en matières premières sont devenues un risque majeur. L’accès aux aciers spéciaux, à l’aluminium, au cuivre, mais aussi aux terres rares pour les aimants permanents ou au titane, est la condition sine qua non de notre compétitivité. Face à une dépendance croissante, notamment vis-à-vis de la Chine qui contrôle une part significative du raffinage et de la transformation, le gouvernement français a lancé une offensive stratégique pour reconstruire une filière souveraine, de l’extraction au recyclage.
Relocaliser la production : des projets structurants pour la filière
L’ambition est claire : réduire les dépendances et créer des capacités de production sur le territoire national. Pour ce faire, l’État mobilise des outils financiers puissants comme le plan France 2030 et le crédit d’impôt industrie verte. Ces dispositifs soutiennent déjà la création d’une quinzaine de nouvelles usines et l’extension d’une dizaine de sites existants, avec à la clé près de 3 800 emplois directs.
Pour l’industrie mécanique, plusieurs projets sont d’un intérêt stratégique direct. La dépendance aux productions chinoises d’aimants permanents est quasi totale. Le projet Caremag de Carester, à Lacq, soutenu en partenariat avec le Japon, vise à produire des terres rares lourdes (dysprosium, terbium) à partir de recyclage et de concentrés miniers, avec l’objectif de couvrir 100 % des besoins nationaux. Ces éléments sont essentiels pour les moteurs électriques, l’éolien et de nombreuses applications en robotique. Dans le même esprit, le projet MagReeesource, en Isère, a pour objectif la production d’aimants par recyclage en boucle courte.
Le cuivre et l’aluminium font aussi l’objet d’un effort majeur sur le recyclage pour produire des matières bas-carbone. Le projet Nexagreen de Nexans, à Lens, doit permettre d’augmenter la capacité de production de fil de cuivre afin de couvrir l’équivalent de 90 % des besoins annuels français en 2028, notamment via une nouvelle fonderie de recyclage. Concernant l’aluminium, plusieurs projets de recyclage devraient permettre de satisfaire 70 % des besoins des industriels français de la transformation à l’horizon 2030, réduisant ainsi drastiquement les importations.
Les aciers spéciaux et le titane, au cœur de la mécanique de précision, bénéficient également de soutiens. Aubert & Duval investit par exemple dans une nouvelle presse de 6 000 tonnes à Pamiers (Ariège) pour la production de lingots d’aciers spéciaux et de superalliages destinés à l’aéronautique. D’autres initiatives visent à moderniser le recyclage du titane aéronautique.
Des opportunités à saisir
Cette stratégie de réindustrialisation ne concerne pas uniquement les grands opérateurs de la métallurgie. La construction de ces nouvelles usines d’extraction (comme le projet de lithium EMILI d’Imerys dans l’Allier), de raffinage (lithium, nickel, cobalt) et de recyclage va générer des besoins importants en équipements, en ingénierie, en maintenance et en services. C’est un marché potentiel considérable pour les PME et ETI de la mécanique, de la chaudronnerie et de l’automatisme.
De plus, l’État a rouvert l’appel à projets « Métaux critiques » en mai 2025 pour continuer à soutenir la construction de nouvelles usines, recyclage inclus. C’est une incitation directe pour les entreprises innovantes, y compris les sous-traitants souhaitant monter en gamme ou se diversifier dans des procédés de valorisation de la matière, à présenter leurs projets.