Franck Grither, maître de la précision

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Services Par Jérôme MEYRAND Publié le  23/06/2025
Franck Grither
Franck Grither à La Fabrique Académie de mécanique, à Villefranche-sur-Saône (Rhône), où il est maître professionnel.

Sacré Meilleur Ouvrier de France en 2011 dans la catégorie « outillage, prototypage mécanique », cet enseignant à l’école de production La Fabrique Académie de mécanique, à Villefranche-sur-Saône, incarne l’exigence et la rigueur du travail de précision.


Maître professionnel à l’école de production La Fabrique Académie de mécanique à Villefranche-sur-Saône, Franck Grither incarne la transmission du savoir-faire mécanique. Élu Meilleur Ouvrier de France en 2011 dans la catégorie « outillage, prototypage mécanique », il revient sur son parcours atypique, marqué par une passion précoce pour l’usinage, un engagement sans faille et une détermination qui l’a conduit à décrocher l’un des titres les plus prestigieux du métier. Entre rigueur, sacrifices et fierté du travail bien fait, il partage avec nous son aventure au cœur de l’excellence industrielle.

Pourquoi avez-vous souhaité participer au concours des Meilleurs Ouvriers de France ?

J’ai eu l’opportunité d’être membre du jury des WorldSkills, lors des épreuves de sélections régionales. Cette expérience m’a beaucoup plu, alors je me suis demandé si ce type de concours existait aussi pour les professionnels.

Comment s’inscrit-on à un tel concours ?

Il faut savoir que c’est une procédure sur trois ans. On fait sa demande d’inscription la première année. On est convoqué pour des qualifications l’année suivante. Pour ma part, il s’agissait d’écrire le process de fabrication d’une potence de vélo. L’épreuve durait trois heures, puis j’ai eu un entretien avec un enseignant de l’Éducation nationale, un MOF et un professionnel. Trois semaines après, j’ai reçu un courrier m’indiquant que j’étais apte pour l’épreuve finale. Une fois que j’ai pris connaissance de mon sujet, j’ai reçu une quinzaine de plans en PDF et l’aventure a commencé pour moi. J’avais un an pour le travailler.

Quel était votre sujet ?

Il fallait réaliser un chef-d’œuvre qui ressemblait à un ballon de rugby, qui pesait une cinquantaine de kilogrammes, et constitué d’un assemblage de pièces de différentes matières : bronze, acier et aluminium. Le ballon était constitué de deux calottes en bronze à ses extrémités, et de huit autres pièces. Quatre pièces mâles et quatre autres pièces femelles avec des queues d’aronde. Un axe qui traversait le centre du ballon et deux pièces en aluminium. Le challenge étant de réussir à assembler toutes ces pièces, aux cotes et ajustements extrêmement précis.

Comment vous êtes-vous organisé pour fabriquer cette œuvre ?

J’étais salarié d’une entreprise spécialisée dans les dispositifs médicaux. Mon employeur était prêt à me libérer un peu de temps. Comme j’étais responsable du service outillage, je me suis organisé pour rester le soir, afin de travailler sur les machines dans le cadre du concours. Sauf que parfois les machines étaient en production. Donc, j’ai dû sacrifier mes jours de congés pour avancer sur mon projet. Mais au bout d’un moment, je me suis rendu compte que cela n’allait pas être suffisant. Mon employeur a donc accepté que j’aménage mes horaires de travail. Je travaillais pour l’entreprise de cinq heures du matin à quinze heures. Et de quinze heures à vingt-et-une heures, je travaillais pour le concours. Sachant que le samedi, je venais aussi à l’atelier, de cinq heures du matin à treize heures pour travailler sur le ballon. J’y ai consacré environ sept cents heures sur un an. J’ai pu rendre le chef-d’œuvre trois ou quatre jours avant la clôture de l’épreuve. L’entreprise m’a ensuite libéré trois autres jours pour que je puisse m’attaquer au travail documentaire, comprenant la description de tous les process de fabrication, de la bibliothèque d’outils, des différents programmes d’usinage, des gammes de contrôle.

Chef d'oeuvre Franck Grither

Le chef-d’œuvre de Franck Grither qui lui a permis d’être désigné Meilleur Ouvrier de France.

Qu’avez-vous ressenti lorsque vous avez appris l’obtention du titre de Meilleur Ouvrier de France ?

Une grande joie. C’est aussi une reconnaissance de nos pairs. Et niveau moral, tu te dis que finalement, tu vaux quelque chose. J’ai toujours eu le regret, sans doute la frustration, de n’avoir pas suffisamment bien travaillé à l’école. Aujourd’hui, je peux dire que j’ai désormais un BTS.

Justement, quel était votre parcours scolaire ?

J’ai passé un CAP tourneur, puis fraiseur et une mention complémentaire en commande numérique. Je n’ai pas poursuivi jusqu’au bac, parce que je voulais rentrer dans la vie active afin d’appliquer ce que j’avais appris à l’école. Puis aussi parce que j’avais du mal à suivre les cours théoriques. Je suis avant tout une personne qui aime toucher la matière.

Qu’est-ce qui vous a donné envie de travailler dans la mécanique ?

C’est parti de mon père qui m’a fait connaître le métier. Un jour, je l’ai accompagné lorsqu’il est allé récupérer des pièces dans une entreprise d’usinage. Je me souviens avoir observé une personne qui était sur un tour en train d’usiner une pièce. Cela m’a attiré tout de suite. J’ai voulu être tourneur comme lui.

Vous semblez être fier également d’avoir obtenu votre BTS, grâce à votre titre de Meilleur Ouvrier de France. C’était important pour vous d’acquérir ce diplôme finalement ?

En effet, car au fond de moi, j’ai toujours exprimé le regret de pas avoir fait un bac en usinage. D’ailleurs, à un certain moment de ma carrière, je voulais savoir ce que je valais sur le marché. Pour cela, je m’étais porté candidat à une VAE [Validation des acquis de l’expérience], de manière à obtenir l’équivalent d’un bac. Sauf que j’ai très vite abandonné, car la procédure était trop longue et trop compliquée.

Franck Grither, maître de la précision
Jérôme MEYRAND - Rédacteur en chefFormé aux microtechniques, devenu journaliste en blouse bleue, passé par l’ESJ Lille.

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