La réduction de l’empreinte carbone, ça passe aussi par l’efficacité énergétique. Qu’en est-il sur vos machines ?
H. F. : On voit arriver, chez les constructeurs, des machines qui vont gérer intelligemment l’énergie. Il fut un temps où le graissage des machines était piloté par une horloge. Aujourd’hui, il est intelligent parce qu’on va vraiment consommer ce dont on a besoin. Vous avez des pompes d’arrosage qui vont travailler avec des variateurs pour avoir la juste quantité d’énergie, de puissance d’arrosage au moment où on en a besoin. Et puis l’idée de posséder des machines automatisées permet de se dire : je vais pouvoir travailler peut-être une ou deux heures de plus, voire travailler la nuit. Et au lieu d’utiliser 100 % de la puissance machine, on va se mettre dans un rythme économique où on n’aura pas besoin de changer de plaquettes d’outils toutes les deux heures par exemple. En fait, on va travailler en mode économie : à la fin de la journée ou de la semaine, on aura réalisé la même quantité de pièces, par contre, on aura utilisé la machine non pas avec des pics, mais plutôt en fait sur le long terme, une méthodologie plutôt japonaise dans le fonctionnement.
F. F. : Je me souviens qu’à Lyon, j’avais loupé ma première commande à cause de la puissance d’une machine. Pourtant, on était toujours très fiers d’annoncer au client des 30 kW, 40 kW et je me suis entendu dire « non, c’est trop puissant pour nous donc ça ne sera pas vous ». Parce que pour ce client-là, la machine consommait trop d’énergie.
La première participation de Decip au Simodec remonte à 1986 et l’entreprise a toujours été fidèle. Participer à des salons professionnels, c’est fondamental, encore aujourd’hui ?
H. F. : Il y a eu un post-Covid, où l’on a imaginé tout digitaliser. On a fait des essais avec des visites virtuelles en 3D, des rencontres en visio. Il n’empêche qu’on peut franchir qu’un certain cap d’une affaire, c’est-à-dire, peut-être 60 ou 70 % d’affaires par visio. Mais à un moment donné, on a quand même besoin d’un contact. La réindustrialisation en France, ça veut dire travailler aussi avec des PME et non des ETI. Les ETI avaient une vision plus globale de l’information par la digitalisation, puisque la production était faite dans d’autres pays. Aujourd’hui, comme on réindustrialise, les patrons ont besoin de motiver leurs équipes. Les patrons ont besoin que les salariés viennent sur les salons, qu’ils s’approprient les machines. Après, je me pose toujours la question des salons hypertrophiés. On en revient à une EMO où on a des salons qui sont monstrueux, ça devient gigantesque. Les frais inhérents à une visite salon, les coûts d’hôtel sont quand même conséquents et je crois plus dans un salon local avec des machines vraiment typées à l’activité industrielle de la région, comme le Simodec et la vallée du décolletage, ou Micronora avec la micromécanique.
F. F. : Je me souviens qu’avant un salon, on organisait toujours une réunion avec les commerciaux afin d’estimer les commandes que nous pourrions prendre. Et souvent, on avait réussi des affaires avec des visiteurs venus venus sur notre stand et qui ont été surpris par nos machines.
H. F. : Quand tu as démarré [il s’adresse à son père], le salon amenait l’information aux personnes, parce que hormis un catalogue ou une brochure commerciale, c’était le salon qui diffusait l’information sur nos machines. Maintenant, le salon vient en complément d’un plan média qui passe par des magazines, par de la vidéo, par le digital. J’ai toujours cru et je continue à croire aux salons.
Cette année, le Simodec fête ses 70 ans. Avez-vous quelques anecdotes à nous raconter ? Personne n’a oublié l’époque où vous jouiez du cor de chasse dans les allées…
F. F. : Avec une équipe de sonneurs de trompe, on venait faire un peu d’animation sur notre stand bien sûr. Mais comme d’autres exposants nous sollicitaient, alors on s’est mis à faire systématiquement le tour du salon. Une autre anecdote me revient : on avait envisagé de réaliser une boîte et son couvercle dans une seule et même barre. Une petite boîte sur laquelle on avait inscrit : « Venez chez Decip et partez protégés. » Vous voyez ce que je veux dire ? Ils ouvraient le couvercle et il y avait un préservatif. Le problème, c’est que nos vaillants techniciens avaient pris tout le stock. Alors il fallait nous réapprovisionner. Du coup, je suis allé à la pharmacie de La Roche-sur-Foron et fièrement j’ai demandé cent préservatifs.
Machines Production vient de lancer son mouvement « Faites du bruit pour l’industrie ». Parce que nous croyons au potentiel inépuisable de l’industrie. Pour quelles bonnes raisons vous feriez du bruit ?
F. F. : Faire bruit en faisant de la publicité, par exemple.
H. F. : Aujourd’hui, on observe un regain pour l’industrie, on a des machines qui changent vraiment esthétiquement, qui changent en puissance de calcul. Je distribue des machines d’impression 3D, c’est quand même magnifique de pouvoir dessiner une pièce et de l’avoir tout de suite entre les mains, finie et sortie de machine. On a des managers d’entreprises qui mettent les moyens pour faire de leur outil de travail, leur site de production, un bel écrin. Le matériel évolue constamment, il y a de quoi faire carrière dans l’industrie. Il y a l’intelligence artificielle qui arrive… Il y a quand même plein de sujets qui valent la peine d’être travaillés.