AÉRONAUTIQUE : Qui fera l'avion du futur ?

De l’hybride à l’hydrogène

Alors que l’avion du futur sera neutre en carbone, quelles nouvelles technologies seront nécessaires pour le construire ? De la fabrication additive aux nouveaux matériaux qu’il faudra usiner, l’avion décarboné devra faire appel à de nouvelles technologies. Si l’impression 3D offrira davantage de possibilité en matière de design et d’optimisation des formes, elle sera également sollicitée pour l’allègement des avions.

Après une phase transitoire où les avions de transport seront hybrides, c’est-à-dire fonctionnant partiellement à l’électrique, et avec un probablement un biocarburant, les constructeurs développeront un appareil à zéro émission, à hydrogène. Mais là, il faudra relever de nouveaux défis technologiques, notamment pour le stockage de ce gaz à l’état liquide, qui n’est pas sans danger.

On en parle dans “Machines Production L’Émission”

Portfolio

Décryptage

Nous recevons deux invités :

Samuel Cutullic, directeur général adjoint de NAE, le réseau Normandie Aéro Espace

Christophe Tisserand, directeur du développement commercial chez MMB Volum-e

Sur notre plateau, ils évoquent :

  • L’allégement de l’avion grâce à la fabrication additive
  • La montée en puissance de l’électrique entraînera l’utilisation de matériaux plus performants
  • Des ruptures technologiques pour l’avion à l’hydrogène

Si les pièces critiques imprimées en 3D ne sont pas légion dans l’aéronautique ou le spatial, il est certain que les constructeurs auront de plus en plus recours à cette technologie de fabrication, une fois arrivée à maturité. Mais déjà ArianeGroup a franchi le pas avec une croix de cardan destinée au système propulsif d’Ariane 5. Une pièce que notre invité, Christophe Tisserand, directeur du développement commercial chez MMB Volum-e, a bien voulu apporter pour cette émission consacrée à l’aéronautique.

interview l'avion du futurAlors qu’il ne fait aucun doute que l’additif sera davantage sollicité à l’avenir, nous avons cherché à savoir quels étaient les critères exigés par les donneurs d’ordre aux fabricants. « Le client a un cahier des charges par rapport à sa pièce, sa fonction et avec des caractéristiques mécaniques, explique M. Tisserand, dont le savoir-faire de MMB Volum-e est de produire des pièces en fabrication additive métal. Notre rôle sera de l’accompagner dans le développement, depuis le démarrage et jusqu’à la production en série des pièces. » Pour cela, MMB Volum-e devra « valider les paramétries sur les machines, poursuit notre invité. Mais aussi valider les santés matières, les porosités. En fait, nous allons valider que la pièce puisse être présentée en usinage, assemblée, puis nous allons assurer le suivi de cette pièce en production série ». Un suivi qui passera par des relevés sur des échantillons, et un suivi sur la qualité de la poudre.

Le poids, la hantise des constructeurs d’avion

Bien sûr, le recours à la fabrication additive sera l’une des clés de la réussite de l’avion du futur, qui sera, très certainement, un appareil n’émettant plus aucun milligramme de CO2. Et c’est le poids qui restera l’ennemi des constructeurs. En s’appuyant sur la fabrication additive, les constructeurs vont « rechercher des gains de poids, mais aussi des gains de performance, qui peuvent ensuite engendrer des gains de poids », évoque, sur notre plateau, Christophe Tisserand. Et d’expliquer qu’une pièce imprimée pourrait posséder les mêmes performances qu’une pièce plus grande, produite de manière conventionnelle. Et en matière d’assemblage de pièces, l’additif rendra bien des services. Pour M. Tisserand, un ensemble mécanique, qui serait constitué de plusieurs pièces produites séparément puis assemblées, pourra être directement imprimé.

Samuel Cutullic, directeur général adjoint de NAE (Normandie Aéro Espace), un réseau d’acteurs du domaine aéronautique et spatial, également invité sur notre plateau, affirme que l’enjeu de la fabrication additive est l’allègement. Pour lui, la décarbonation dans l’aéronautique passera, dans un premier temps, par une réduction de la masse d’un avion, « pour moins consommer ». Et « grâce à la fabrication additive, « nous allons optimiser les pièces. C’est un réel levier », pour construire l’avion du futur.

Détensionner les pièces imprimées

Contrairement à l’usinage où les pièces sont peu sujettes à des opérations de reprise, les pièces imprimées arrivent très rarement chez le client sans passer par quelques étapes de post-traitement. « Dans la plupart des cas, la première étape passe par une phase de détensionnement des pièces, explique Christophe Tisserand. Car, lorsque nous allons construire les pièces en fabrication additive sur un plateau, nous allons créer des tensions, de par le process, donc il faudra détensionner ces pièces. » Ensuite, il faudra « les découper, soit par électroérosion, soit par scie », poursuit notre expert. L’étape suivante est très souvent un traitement thermique et un usinage. « Pour usiner les parties fonctionnelles, comme des portées de joints, par exemple », décrit M. Tisserand, qui parle également de polissage, et de revêtements « pour avoir des caractéristiques mécaniques finales ou des résistances à la corrosion, par exemple ».

Avant que l’avion à hydrogène ne prenne son envol, nous pouvons imaginer qu’il sera hybride, fonctionnant partiellement à l’électricité. A ce stade-là, quelles technologies seront nécessaires pour le fabriquer ? « On va avoir une première étape 2032-2035 avec un avion hybride », répond Samuel Cutullic. C’est-à-dire, un avion propulsé à la fois par un turboréacteur ou un turbopropulseur alimenté par du biocarburant type SAF, et un moteur électrique. Il y aura des enjeux liés aux nouveaux matériaux et aux nouvelles technologies qui seront intégrés dans l’avion hybride.

Soudure par friction malaxage

« Sur l’électronique et l’électrique, nous allons rencontrer une montée en puissance, ce qui va signifier des équipements qui vont chauffer. Il va falloir dissiper la chaleur, avec des échangeurs beaucoup plus efficaces, beaucoup plus efficients », explique M. Cutullic, qui évoque également de nouveaux procédés, comme la soudure par friction malaxage avec de l’aluminium ». La fabrication additive va également aider les ingénieurs à optimiser les formes.

Quant à l’avion à hydrogène, que Samuel Cutullic ne voit arriver pas avant 2050, d’autres défis seront à relever. « Aujourd’hui, les tendances, c’est plutôt de l’hydrogène liquide, donc plutôt à -250 degrés, par cryogénie. Donc, nous allons avoir besoin de réservoirs qui vont tenir ces températures-là et surtout protéger l’environnement. »

Le directeur général adjoint du réseau NAE parle alors de « réservoirs avec des isolations beaucoup plus fortes », avec « des revêtements sol-gel de façon à pouvoir bien maintenir la température ». L’autre problématique, c’est que l’hydrogène est un composant très dangereux, qui peut être amené à fragiliser les matériaux, soulève notre expert, pour qui il faudra « mener des caractérisations autour de ces matériaux et très certainement faire évoluer ces matériaux qu’on utilise classiquement dans l’aéronautique ».

Intervenants

Portfolio

Samuel Cutullic

NAE

Directeur Général Adjoint

Portfolio

Christophe Tisserand

MMB Volum-e

Directeur développement commercial

Portfolio

Jérôme Meyrand

Machines Production

Rédacteur en Chef

Portfolio

Patrick Cazier

Machines Production

Rédacteur