Covid-19, le jour d’après… les gagnants et les perdants

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Par Machines Production Publié le  26/06/2020
Covid-19, le jour d’après… les gagnants et les perdants

Il est à parier que les compagnies low-cost seront les grandes gagnantes de cette crise, estime dans cette tribune Eric Schulz, ayant dirigé Rolls-Royce et les ventes d’Airbus avant de devenir consultant. Ce qui est une bonne nouvelle pour les constructeurs, en particulier, Airbus qui domine le créneau du moyen-courrier avec la famille A320 Neo.

Qui aurait pu croire que cela soit possible ? Depuis longtemps, toutes les grandes entreprises mondiales développent des plans stratégiques pour faire face à une pandémie. Mais au-delà de l’exercice théorique, force est de constater que la crise du Covid-19 va bouleverser notre monde de façon magistrale. Le transport aérien, stoppé net dans son élan de croissance soutenue, va traverser une crise qui le menace de façon existentielle. Alors, au-delà des cas individuels, quels seront les gagnants et perdants de ce grand chamboulement ?
Le retour du trafic se fera de façon asymétrique, en fonction d’une multitude de critères incluant les régions, les gouvernements, les nouvelles règles d’hygiène et des facteurs ethniques. Cette crise a déjà démontré qu’il est très difficile, même dans des régions pourtant censées être homogènes, comme l’Europe ou l’Amérique du Nord, d’arriver à des décisions communes et partagées. Dès lors, le manque d’alignement entre Etats complique un peu plus le retour du trafic. En Chine et dans le sud-est asiatique, régions affectées avant nous et déjà dans une situation de retour aux affaires, on note une inflexion notable sur le moyen-courrier, alors que le trafic long-courrier peine à redécoller. Cette tendance va s’amplifier et il est probable que ces deux marchés connaissent des reprises très différentes.

Reprise accélérée

Alors qu’il redeviendra plus aisé de voyager par avion à l’intérieur d’une région homogène en termes de réglementation, on peut s’attendre à une reprise du trafic relativement rapide sur le court-moyen-courrier, (que je chiffre entre 18 mois à deux ans pour revenir à une situation pré-Covid-19). Si cette hypothèse se vérifie, il est à parier que les compagnies low-cost seront les grandes gagnantes. En effet, la densification des machines, leur exploitation soutenue, ainsi que la capacité à se redéployer là où le besoin de trafic existe, sont les caractéristiques fondamentales des compagnies low-cost. Elles permettent un gain économique certain, qui deviendra prédominant dans un contexte où le pouvoir d’achat de chacun va être diminué de façon notable (que ce soit par une baisse de revenus ou par une augmentation de la fiscalité). Ceci est une bonne nouvelle pour les constructeurs et, en particulier, pour Airbus qui domine le créneau du moyen-courrier avec la famille A320 Neo et dont le carnet de commande sur ce créneau est majoritairement dominé par ces compagnies dans tous toutes les régions du monde, y compris les pays émergents. En effet, nombre de ces compagnies low-cost ont des flottes relativement réduites par rapport à leurs carnets de commandes. Ainsi, une reprise accélérée pour elles imposera, par voie de conséquence, un besoin de leurs nouveaux avions, ce qui, en retour, soutiendra les cadences de production des constructeurs.

Pression diplomatique

En revanche, le long-courrier international souffrira plus et ce, pour plusieurs raisons. En premier lieu, le confinement a permis à chacun d’utiliser les moyens modernes de communication via Internet. Ce changement va affecter de manière durable les habitudes dans les entreprises impactant le trafic « affaires », composante essentielle du long-courrier. D’autre part, devant la crise économique et, avec elle, son lot de restructurations et de licenciements, les ménages auront d’autres priorités que celles de partir loin en vacances, ce qui affectera l’autre composante du trafic long-courrier. Enfin, la globalisation, et notamment les conséquences de l’hyper-dépendance du monde occidental, vont probablement ralentir la croissance mondiale dans un contexte de pression diplomatique exacerbé. Dès lors, le trafic long-courrier sera probablement impacté pour une période beaucoup plus longue (4 à 5 ans) avant que nous retrouvions des trafics comparables à l’activité pré-Covid19.
Ce secteur, qui n’a pas connu une forte pénétration par les low-cost, est un marché principalement de remplacement, par opposition à la croissance spectaculaire du marché des petits porteurs. Devant la baisse de trafic annoncé, les compagnies traditionnelles vont souffrir, ce qui, par ricochet, va affecter les constructeurs. Il est donc probable que les compagnies aériennes traditionnelles vont, d’une part, tenter de ralentir leurs livraisons et, d’autre part, de mettre à la retraite anticipée leurs plus vieux gros porteurs, afin de limiter une situation de surcapacité. Dès lors, nous verrons probablement des flottes qui disparaitront définitivement (B747-400, A340-300, A340-600, A380, B767). Un élément important dans le gros porteur sera la percée prévisible du trafic point-à-point, par opposition au trafic de connexions (hubs). En effet, la connexion dans un hub introduit une complexité supplémentaire en matière d’hygiène et de traçage des passagers. L’idée de croiser des centaines de milliers de gens dans un espace confiné est peu rassurante. Cette baisse de fréquentation des hubs aura un effet double sur les transporteurs traditionnels, en diminuant le trafic long-courrier comme déjà vu précédemment, mais aussi en diminuant, de facto, la part de trafic court-courrier de ces dernières dédiée à l’alimentation des hubs.

Marché saturé

Dans ce marché tendu, qui s’est inversé en six mois, les compagnies de leasing vont connaitre d’immenses difficultés, car elles vont être confrontées à deux risques majeurs. D’une part, celui de voir revenir des avions récents qui cesseraient d’être exploités par des compagnies aériennes en situation de banqueroute (Virgin Australie, Air Mauritius, Avianca ou encore Latam) et, d’autre part un nombre important de livraisons d’avions neufs, tout ceci à un moment où le marché est saturé. Dans ce contexte, des défections de compagnies de leasing petites et mal exposées sont probables.
Ces changements vont entrainer des modifications profondes du paysage aéronautique, affectant tous les étages de la supply chain et des services. Dans ce contexte, l’attractivité des petits porteurs opérant sur un marché qui redémarrera plus vite (en particulier la famille A320/A321 Neo dominante sur ce segment), ainsi que les low-cost, renforcées par cette crise, font figures de valeurs sûres. Dans un marché plus significativement sinistré, l’entrée de marché gros porteurs, et en particulier le B787-9 et l’A350-900 pour leur efficacité en trafic point à point sont aussi des programmes qui devraient être relativement épargnés. La diversité inter-programme est toujours un gage de protection pour l’ensemble de la supply chain. Des restructurations ainsi que des consolidations sectorielles, rendues nécessaires par les difficultés d’opérateurs trop exposés sur des programmes fragiles ou trop dépendants de clients sinistrés, créeront aussi des opportunités. Il faudra savoir les saisir pour préparer le rebond qui, tôt ou tard, interviendra. A plus long terme, cette crise, à n’en pas douter, va aussi sceller les bases d’une mutation technologique. Il est notable de constater que, pour la première fois, les aides gouvernementales sont assorties d’engagements de réductions de CO2. Cela démontre que le monde devient de plus en plus conscient des problèmes environnementaux. Cela créera les fondations permettant à notre industrie de se réinventer, en investissant en technologie et en innovation.

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